C'est quoi ce travail ?

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1. Accompagner vers l’emploi : la coopération entre encadrant(e)s & ASP

 

Animateurs : Henri Combi, Sébastien Hébard et Charlotte Porez

Présentation

1.      Contexte

Situés au cœur des dispositifs d’accompagnement des salariés vers l’emploi sur les Jardins, les Encadrants Techniques et les Accompagnateurs Socio-Professionnels doivent trouver les moyens, le temps, les outils et le cadre permettant de réaliser la mission première des ACI.

Métiers souvent en tension, devant répondre à des exigences d’efficacité et de « rentabilité »  (atteindre 60% de sorties dynamiques et 30% d’autofinancement), il ressort que les encadrant(e)s et ASP ont parfois du mal à faire se rejoindre ces deux impératifs et sont toujours en recherche de solutions à la fois en termes d’organisation et d’outils à leur disposition.

2.      Enjeu

L’enjeu est donc de permettre une rencontre entre les métiers de l’encadrement et de l’accompagnement autour du parcours vers l’emploi des salariés. Et ainsi de creuser comment encadrant(e)s et ASP peuvent mieux coordonner leur travail ?

3.      Objectifs

Les objectifs de l’atelier étaient de définir ensemble les caractéristiques des métiers encadrant(e)s et ASP, d’identifier la pertinence et les limites de l’organisation et des outils actuellement utilisés dans le contexte présenté ci-dessus, de récolter des bonnes pratiques et de proposer des innovations.

 

Restitution de l’atelier

1.      Témoignages

En préambule, et pour « chauffer les esprits », deux Jardins de Cocagne ont été amenés à témoigner des outils et dispositifs qu’ils ont mis en place afin d’illustrer ce que nous entendons par « coopération ».

Le Jardin de Cocagne des Gorges de l’Aveyron a présenté l’outil mis en place par la chef de culture et qui permet à l’ASP de visualiser les pics d’activité de production. Pour chaque quinzaine de l’année a été calculé un nombre de postes d’ouvrier maraîcher incompressible afin d’assurer la production. Par opposition, cet outil détermine ainsi le nombre de salariés que l’ASP peut prévoir d’embaucher, de mobiliser sur une PMSMP, d’envoyer en formation, etc.

Le  deuxième témoignage a été celui du Jardin « Graine de Cocagne » à Saint Marcel les Valence. La majorité des permanents a pu faire le déplacement au Forum grâce au développement de l’autonomie des salariés.

Cet exercice, proposé par l’ASP, a fait suite, explique-t-elle, à un constat d’équipe : « Des vols qui ont eu lieu entre collègues, et les différentes rumeurs attenantes, ont mis à mal la confiance au sein du groupe et la dynamique antérieure ne parvenait pas à revenir. En réunion d’accompagnement, nous avons réfléchi au support qui leur permettrait de fédérer leurs forces et de se sentir faisant partie d'un collectif de travail soudé. »

Les jardiniers ont donc été accompagnés et poussés à élaborer eux-mêmes une journée de travail, puis à la mette en œuvre sans l’intervention des encadrants. L’expérience a été une vraie réussite et a permis aux ouvriers maraîchers de gagner en confiance, en investissement et de ressouder l’équipe autour d’un projet commun, tandis que les encadrants les voient désormais comme des collaborateurs.

 

2.      Travail en groupes

Henri COMBI, formateur au diplôme ETAIE (Encadrant Technique d’Activités d’Insertion par l’Économique), a proposé aux 50 participants de se répartir en 5 groupes. Chaque groupe se voyait confier une étude de cas issue de situations réelles, permettant de travailler collectivement des situations de coopération encadrant-ASP. Les études portaient sur les thèmes ci-dessous :

  1. Coordination entre ASP et encadrant(e)s : les informations sont parfois (souvent ?) passées de manière informelle, on manque de temps pour se réunir, discuter du parcours des personnes, évaluer les compétences, définir et mettre en place des actions, des outils, des règles de fonctionnement, etc.. Comment améliorer, mieux partager et coordonner le travail des ASP et encadrant(e)s ?

  2. Faire évoluer les salariés sur leurs postes de travail : pourquoi, comment, sur quels critères, avec quels objectifs ? En quoi cela  remet-il en cause la manière de travailler, d’organiser, d’évaluer, d’accompagner, etc. ?

  3. Évaluation des compétences : en matière d’évaluation des compétences, les professionnels n’ont pas toujours l’impression de parler de la même chose : savoir-être et/ou savoir-faire.  Il peut donc exister des malentendus sur ce qu’on est en train d’évaluer et comment on le fait. La notion de compétence transférable est également à travailler collectivement.

  4. Les ACI ont la possibilité d’augmenter les heures hebdomadaires des contrats jusqu’à 35 heures : sur quels critères peut-on faire évoluer les salariés vers un temps de travail renforcé ? Comment se saisir de ce dispositif ? Comment rendre ce dispositif équitable ? Quel management cela implique-t-il ?

  5. Partage des informations : ASP et encadrant(e)s doivent-ils avoir accès aux mêmes informations concernant les salariés ? Quels peuvent être les impacts sur le travail au contact des salariés ? La confidentialité : pourquoi, comment ? Qu’est-ce qu’être un professionnel de l’encadrement et de l’accompagnement ?

 

3.      Restitution.

Il ressort du travail en groupes qu’il est important pour les encadrants et les ASP de pouvoir incarner leur fonction à l’intérieur d’un cadre travaillé en commun et en équipe, de questionner en permanence leur posture professionnelle et d’établir une collaboration basée sur la confiance mutuelle.

Le temps manque parfois et la gestion du quotidien et des urgences ne permet que trop rarement de faire un pas de côté et d’imaginer des dispositifs et des solutions d’accompagnement innovantes, et ce d’autant plus qu’il existe déjà des difficultés à s’approprier les dispositifs existants.

Ainsi, il ressort que tous les Jardins ne font pas jouer la possibilité qu’ils ont d’augmenter les heures de travail hebdomadaires des ouvriers maraîchers. Certains mettent en avant le fait que les salariés ont besoin de pouvoir effectuer un certain nombre de démarches sur les heures d’ouverture des administrations ou d’autres structures (auto-école, etc.), d’autres estiment que tous les salariés devraient tendre vers un contrat à 35 heures en fin de parcours. Il est également ressorti l’importance de se baser sur des critères transparents pour étudier des augmentations d’heures.

Concernant l’évaluation du parcours et des compétences des salariés, l’utilisation des grilles est parfois remise en question, mais peu de Jardins semblent avoir réellement réfléchi à des alternatives. Cela dit, il semble qu’au-delà de la remise en question de ces outils, c’est surtout la manière de les utiliser qui est le plus important. Les encadrants et ASP ont tendance à les utiliser comme point de départ d’une discussion, d’un levier permettant d’engager un dialogue, plutôt qu’une évaluation jugée scolaire et réductrice, l’objectif étant de développer la confiance en soi des personnes. Il peut être intéressant de travailler des grilles évolutives, qui s’adaptent au parcours du salarié.

Le travail en binôme encadrant/ASP est apparu comme une condition indispensable à la réussite de l’accompagnement et au travail des projets professionnels des salariés. Ainsi les participants ont estimé que s’ils ne doivent pas « tout se dire » de la situation et du parcours des salariés (seules les informations impactant le travail ou le projet sont à partager), il est par exemple fondamental que les encadrants assistent et participent au processus de recrutement. Et la notion de confidentialité est importante. Enfin, le partage d’information permet aussi d’avoir un discours commun et donc d’être crédibles collectivement.

Cela dit, les encadrants et les ASP ne sont pas seuls sur un Jardin (il y a une direction, des bénévoles, etc.) et ne sont pas non plus isolés. Ils travaillent en permanence et en collaboration avec un ensemble d’organismes et de structures, un environnement professionnel partie prenante de l’accompagnement des personnes, de leur parcours, de leur projet. Il se joue donc aussi beaucoup de choses dans la manière que les Jardins ont de travailler leurs problématiques internes en externe.

 

4.      Conclusion.

En conclusion, Henri COMBI a invité les participants à réfléchir aux notions de compétences transversales et de compétences transférables et comment ces compétences peuvent être développées grâce au travail des encadrants.

Mais ces notions ne suffisent pas et doivent être accompagnées chez les personnes en parcours dans les SIAE par le Sentiment d’Efficacité Personnelle, concept développé par Albert BANDURA et qui le définit comme "la croyance qu'a chacun d'être capable d'influencer son fonctionnement psychosocial et les évènements qui affectent sa vie. […] Cette croyance est véritablement au cœur de la motivation. Sans la conviction que ses actions le mèneront vers ce qu'il attend ou le protègeront de ce qu'il ne désire pas, aucun individu ne prendrait d'initiatives ni ne persévérerait face aux difficultés. Peu importe l'ensemble des facteurs qui le guident ou le motivent, ils sont tous ancrés dans la conviction fondamentale qu'il a le pouvoir de changer les choses par l'action".

L'appropriation du Sentiment d’Efficacité Personnelle est donc une condition déterminante pour que l'individu se motive à se projeter dans l'avenir et que, ce faisant, le processus mental d'élaboration du projet professionnel se mette en marche. Aux encadrants de mettre en œuvre les conditions qui permettront à ce sentiment d’éclore à travers le travail, pour l'ASP, il ne restera alors plus qu'à accompagner la "mise en forme" du projet professionnel.

 

Demandes au Réseau Cocagne pour continuer à creuser cette thématique :

  • Organiser des réunions régionales Encadrants/ASP dans toutes les régions, à partir de l’expérience en Occitanie
  • Retravailler le livret d’évaluation des compétences, pour que les évaluations puissent être évolutives et tendre vers un livret d’évolution des salariés
  • Intégrer (que si ce n’est pas déjà fait) la question de l’évaluation des compétences dans les formations des encadrants et des ASP