de quoi l'insertion est-elle le nom?
Un débat des Un an de la stratégie de prévention et lutte contre la pauvreté
12 septembre 2019, Aubervilliers
L’insertion comme une action publique globale
« Nous sommes en face d’une montagne » interpelle Louis Gallois, psd FAS, au sujet des 2 millions de chômeurs de longue durée. « Une matrice de l’exclusion » qui pourrait être contrée par la mise à l’emploi, formation (ou la « montée en compétence ») et accompagnement pour caractériser l’IAE dans ses spécificités méritoires… d’où le regret sur les très belles réussites des emplois aidés. L’enjeu est bien la remise en situation de travail, acquérir des expériences, et puis le « travail de dentellière » de l’accompagnement car chaque fois un cas particulier, des crédits qui ont diminué dans tous les départements… les parcours sont chaotiques et non linéaires, 54 mois de moyenne de sortie de l’emploi pour les personnes de l’expérimentation territoires zéro chômeurs… Une réforme globalement positive aujourd’hui dès lors qu’on désenclave l’IAE en le considérant comme un acteur économique, auprès des entreprises, faire sauter ce plafond de verre au-dessus de l’IAE avec la méconnaissance de l’insertion par le tissu entrepreneurial local. Attention à ce que la réforme ne favorise les personnes les plus proches de l’emploi, or les chantiers doivent aller chercher les plus éloignés. Louis Gallois présente le dispositif SEVE d’accompagnement conjoint des personnes et de l’entreprise pour l’accueil durable des publics, il poursuit avec le TZCLD comme dispositif de création d’emplois à partir des aspirations et capacités des personnes. L’IAE pourrait s’inspirer de ce dispositif « complémentaire » pour Jean-Marie Marx, Haut commissaire et animateur de la table ronde.
L’insertion comme enjeu stratégique d’entreprise ordinaire
Eric Challan-Belval, animateur du club « 10 000 entreprises inclusives » d’Ille-et-Vilaine, « pas de mondes séparés » pour lui entre entreprises d’insertion et entreprises ordinaires, « vous aussi avez un rôle social » rappelait-il aux entreprises qui sembleraient y venir déjà pour des enjeux de recrutement et du pourquoi les gens ne veulent pas venir travailler chez eux… un sens au travail qui est devenu une exigence pour toutes les entreprises, même si les grandes sont organisées… « les grands font de la com ! » le coupe Louis Gallois… « Nous devons créer un trophée des entreprises inclusives dans notre territoire, des petits pas car toutes ne seront pas RSE friendly… » lui répond Eric Challan-Belval. Les SIAE devront de toute façon remplir leur carnet de commandes, faire de l’économie, rien ne se fera par des appels d’offres nationaux, pour lui : « Il faut allotir localement pour que les PME puissent intervenir sur des marchés en face des 100 000 nouveaux postes que le gouvernement a mis sur la table » .
L’insertion au-delà de l’emploi comme accompagnement global
Jean-Pierre Tabeur, directeur territorial de Pôle emploi dans la Somme, évoque les 10% des besoins du territoire (7000 personnes) couvert par l’accompagnement global (un binôme qui suit la personne), une réallocation de ressources pour développer en lien avec le département et les associations du territoire. Pour Rémi Tricart, directeur de Convergences France, il faut « Evaluer aussi l’impact de l’insertion et de l’accompagnement global sur les enjeux santé, qualité de vie des personnes au-delà du retour à l’emploi ». Idem pour l’action du groupe SOS dans l’Eure avec accompagnement santé des bénéficiaires du RSA (Gaëlle Tellier) avec l’aide du département, la santé étant un frein à l’emploi évident, d’où le besoin d’évaluation de la santé des personnes avec elles avant de penser la concordance de leur projet professionnel (intervention d’infirmier et psychologue avec les accompagnants socio-prof.).
L’insertion comme projet de rénovation de l’économie
Julien Adda, directeur du réseau Cocagne, rappelle, de la salle, que la question posée mérite une réponse au-delà de la seule fonction, première, d’accompagnement vers l’entreprise ordinaire, se joue là une fonction de « rénovation de l’économie » pour des personnes qui n’y reviendront que difficilement, se joue aussi là des actions et expérimentations d’économies coopératives de territoire. Il donne l’exemple de l’enjeu des circuits courts alimentaires, issus notamment des mondes des paysans bio organisés et des chantiers d’insertion, contre une logique possible de « conventionnalisation » par l’offre de la grande distribution notamment depuis quelques années. Nous pouvons jouer un rôle d’interface économique non lucrative dans une organisation de territoire « hors marché », à l’instar d’ateliers de transformation, de collecte et mise en paniers, de circuits de distribution et de vente aux abonnés adhérents, de services d’animation pédagogiques sur l’accès à l’alimentation et, par ailleurs, travailler avec la grande distribution et le monde agricole sur des besoins en main d’œuvre qualifiée et accompagnée.