2. Les fameux « freins à l’insertion » sont-ils toujours un empêchement pour reprendre un travail ?

 
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Intervenantes animatrices : Charlotte Fourest, Stéphanie Lagleize, Elise Lussier (Cocagne Haute Garonne), Cocagne Haute Garonne

Rapporteuse : Muriel Conq

 

Introduction

10 minutes

Les salariés du groupement d’employeur Cocagne Haute Garonne ont fait part de leur expérience suite à l’expérimentation Sève (SIAE et Entreprise Vers l’Emploi) lancée en mai 2016 par la fédération des acteurs de la solidarité.

Les objectifs de cette expérimentation sont :

« Développer une médiation sur les territoires entre les entreprises et les demandeurs d’emploi, en particulier ceux qui sont peu ou pas qualifiés, consistant à :

  • Accompagner les entreprises dans leurs pratiques de recrutements, d’accueil et d’intégration de nouveaux salariés, d’adaptation des postes de travail aux compétences des personnes, et dans l’émergence d’offres d’emploi ;
  • Permettre aux salariés en insertion de mieux définir et préparer leur projet professionnel en multipliant les mises en relation avec les entreprises. »

À la suite d’un accompagnement de l’ensemble de la structure sur 18 mois par les formateurs de Sève, les salariés de Cocagne Haute Garonne ont adopté le principe « tout le monde est employable » et ont modifié en conséquence.

  • les pratiques d'accompagnement et d'organisation interne : les mises en relation entreprises/salariés sont l'affaire de tous (CIP, ETI, direction, ARA, assistant administratif). Des temps de relation entreprises dédiés ont été mise en place ainsi que des temps de coordo équipe. Des mises en relation dès le 1er contrat sans prendre en compte les « freins » (sauf exception)
  • Les relations avec les entreprises : changement de discours (entreprise solidaire vs association, transition professionnelle vs insertion, objectif d'ouverture et découverte vs service à demander), de posture (se considérer et se présenter à parité avec l'entreprise).
  • Les relations avec les salariés : changement de discours (adhésion au projet de transition et d'objectifs de mises en relation), de posture (dynamique de groupe tournée vers l'extérieur).

Les principaux constats :

  1. Il n’est pas obligatoire de lever les freins sociaux avant d’envisager le retour à l’emploi dans une entreprise dite classique. Les mises en relation entreprises peuvent accélérer la résolution des freins. En somme le travail de production dans les champs et le travail de médiation en accompagnement socio-pro se nourrissent mutuellement.
  2. Toute l’équipe permanente doit être impliquée dans cette démarche afin de :
    1. Induire une adaptation de la posture de l’ensemble de l’équipe d’encadrement ;
    2. Articuler les temps immersion/production au Jardin.
    3. Activer le réseau de professionnels de chaque salarié permanent/bénévole/adhérent pour créer des passerelles emploi.

Ces changements se sont accompagnés d’une résistance de certains membres de l’équipe de permanents, les intervenantes ont insisté sur l’importance d’être accompagnés dans cette démarche et d’avoir des dirigeants ayant la volonté d’associer l’équipe dans cette démarche.

Plus d'info sur : http://www.federationsolidarite.org/champs-d-action/iae-emploi-et-formation/exp%C3%A9rimentation-s%C3%A8ve

 

Atelier

30 minutes

A la suite de l’introduction, les intervenantes ont proposé un atelier aux participants autour de 3 questions :

  1. Est-ce que tout le monde est employable ? Quels sont mes freins pour y croire ?
  2. Qu’est-ce que je pense devoir changer dans l’accueil et l’intégration des personnes pour inscrire ma structure dans cette démarche ?
  3. Qu’est-ce que je pense devoir changer dans la démarche globale d’accompagnement pour inscrire ma structure dans cette démarche ?

Type d’animation : chaque binôme dispose de 5 minute pour échanger sur chaque question et faire ressortir une idée clé par post-it.

Ci-dessous les idées ressorties pendant les échanges par binôme :

« Tout le monde est employable » :  Quels sont mes freins pour y croire ?

1.       La vision en interne

  • « La politique interne de la structure »
  • « Les préjugés, mauvaise identification des points forts »
  • « Mes propres filtres, ce que je ne veux pas entendre »
  • « Notre vision de la motivation à travailler d’une personne »
  • « Un a priori sur les représentations des comportements de nos maraîchers »
  • « Appuyer sur les freins plutôt que sur les leviers »
  •  « Qui peut juger de l’employabilité d’une personne ? »
  • « La mise en situation d’immersion permet de changer le contexte et relayer les problèmes sociaux dans un second plan »

 

2.      Le diagnostic interne et partagé avec les prescripteurs

  • « Mes outils d’autodiagnostic ne sont pas adaptés »
  • « La personne qui prescrit, oriente »
  • « Ma formation initiale n’est pas adaptée »
  • « Notre évaluation de la lourdeur de la problématique sociale ou de santé qui peut paraitre prioritaire »
  • « Le temps de stabilisation à l’arrivée dans le Jardin »
  • « L’échec vécu de manière répété par la personne peut contribuer à son auto dévalorisation »

 

3.      La relation avec les entreprises locales

  • « Méconnaissance des prérequis des entreprises »
  • « Les entreprises ne sont pas prêtes à embaucher tout le monde »
  • « Trop de risques à se griller auprès des employeurs durables »
  • « Tout le monde est employable, cela dépend de l’emploi et de l’employeur »
  • « Des attentes différentes en fonction des employeurs »
  • « Ce sont les employeurs qui ont des freins »
  • « L’employeur ne joue pas le jeu »
  • « La gestion de l’échec de l’employeur »

 

4.      La posture professionnelle

  • « L’image renvoyée par le candidat »
  • « Le manque de ponctualité »
  • « Les problèmes personnels ou psychiques »

 

5.      Le manque de leviers

  • « Le manque d’accès à différents moyens de subvenir à des besoins essentiels (nourriture, logement, famille) »

 

6.      Le manque d’adaptabilité du marché du travail aux situations spécifiques des personnes

  • « Concurrence dans le recrutement qui est conduit par le choix des meilleurs »
  • « Les problèmes personnels ou psychiques »
  • « Des degrés d’employabilité différents selon les personnes »
  • « Une efficacité insuffisante »
  • « Pas en structure classique mais oui dans ces centres spécialisés sur un poste spécifique »
  • « Un environnement ne permettant pas de tenir compte des difficultés de chacun »
  • « La barrière de la langue »
  • « L’adaptation des horaires et des conditions de travail »

Qu’est-ce que je pense devoir changer dans l’accueil et l’intégration des personnes pour inscrire ma structure dans cette démarche ?

1.       La posture

  • « Accompagner le salarié en tant que demandeur d’emploi »
  • « Définir les limites de la distance professionnelle »
  • « Le même accueil professionnel pour tout le monde »
  • « Créer une relation ‘donnant-donnant’ entre l’employeur et l’employé »
  • « Susciter de la confiance »
  • « Changer le discours fait au salarié »

 

2.       L’accueil et le diagnostic

  • « Durant les recrutements, porter davantage d’attention aux compétences qu’aux prérequis via un diagnostic des compétences »
  • « Durant l’accueil, poser le cadre global de l’accompagnement de manière plus transparente : insertion sociale + insertion professionnelle »
  • « Des outils d’évaluation et de valorisation des salariés en insertion »
  • « Changer la hiérarchie des freins »
  • « Mettre en place un contrat d’objectif sur le terrain avec l’ASP et les ETI »
  • « Associer le salarié dans l’évaluation pour qu’il prenne conscience de ses capacités et de ses manques »
  • « Commencer la recherche d’emploi dès le premier mois »

 

3.       L’intégration dans l’équipe

  • « Renforcer l’encadrement, former les encadrants techniques à l’accompagnement de différents publics »
  • « Annoncer l’arrivée du salarié à l’équipe en amont »
  • « Associer l’ensemble de l’équipe dans la démarche »
  • « Faciliter la cohésion d’équipe en tenant compte du mouvement RH permanent »
  • « Adapter les horaires aux problématiques de santé »
  • « Adapter les règles de sécurité, le rythme de travail pour tenir compte des problématiques de santé »

 

4.       La relation avec les entreprises

  • « Accélérer le contact avec l’entreprise »
  • « Faire un suivi avec l’entreprise pour s’assurer de l’accueil du salarié dans de bonnes conditions »
  •  « S’appuyer sur les réseaux professionnels de chacun pour contacter les structures les plus adaptées au profil de la personne »

 

Qu’est-ce que je pense devoir changer dans l’accompagnement pour inscrire ma structure dans cette démarche ?

1.       La posture et démarche d’accompagnement

  • « Susciter plus de confiance et accompagner à l’autonomisation »
  • « Adapter son vocabulaire »
  • « Proposer une formation/coaching pour tous les permanents sur une autre dynamique d’accompagnement – sur la posture et éléments de langage »
  • « Créer des groupes de réflexion collective, s’appuyer sur un groupe de salariés, débloquer les freins psychologiques via le partage d’expérience »

 

2.       La démarche d’accompagnement

  • « L’accompagnement doit être le même pour tous les salariés »
  • « Prendre en compte la personne dans sa globalité »
  • « Travailler sur les difficultés et le ciblage de l’emploi recherché simultanément »
  • « Etablir une charte de l’accompagnement »
  • « Accompagner le changement de regard du salarié en insertion sur lui-même »
  • « Faire des simulations d’entretien avec les salariés »

 

3.       L’organisation de l’équipe

  • « Mieux déléguer »
  • « Renforcer la participation de l’ensemble de l’équipe »
  • « Adapter le planning avec les ETI »
  • « S’inspirer de l’initiative « Hors les murs » 

 

4.       La structure en interne

  • « Faire évoluer les processus, le matériel pour que les chantiers soient plus proches de la réalité de l’entreprise »
  • « Faire évoluer le public accompagné »

 

5.       La relation avec les entreprises

  • « Mieux connaître le monde de l’entreprise, ses problématiques et attentes et créer des partenariats forts »
  • « Ne pas avoir peur de se confronter avec les entreprises, cela donne des billes pour l’accompagnement vers l’emploi »
  • « Ne pas attendre les opportunités d’emploi mais les provoquer »